Biographie
Laurent Cugny, né en 1955, est compositeur, arrangeur, pianiste et, depuis 2006, professeur de musicologie à la Sorbonne. À vingt-quatre ans il crée le big band Lumière et en 1987 met sur pied, parallèlement à la rédaction de ce qui sera le tout premier livre à être consacré à Gil Evans (Las Vegas Tango, P.O.L, coll. Birdland, 1989), une tournée européenne de l'orchestre dont il partage pour l'occasion la direction avec son mentor. Deux disques en naissent : Rhythm-A-Ning et Golden Hair, qui marquent les débuts d'une collaboration avec PolyGram où il voit paraître une dizaine d'albums à la tête de sa grande formation. Lauréat de l'Académie du jazz (prix Django-Reinhardt en 1988 ; prix Robert-Goffin en 1990 pour son essai sur Evans), il a, en 1993, créé avec Lumière un répertoire d'arrangements à partir des thèmes de la période "électrique" de Miles Davis (Yesternow, Verve, 1994). Il a dirigé l'ONJ (Orchestre national de jazz) de 1994 à 1997, la Maison du jazz de 2000 à 2004 et, chez Outre Mesure, Les Cahiers du jazz de 2004 à 2006. Auteur d'arrangements pour Abbey Lincoln, Juliette Gréco, Viktor Lazlo et David Linx, il a créé en 2006, avec ce dernier en vedette, un opéra-jazz au festival de Vienne : La Tectonique des nuages.
Détail
Qu'est-ce qu'une oeuvre musicale ? La question est posée depuis toujours. Mais l'examen de la littérature montre qu'elle est le plus souvent traitée avec pour seul modèle l'oeuvre musicale écrite, c'est-à-dire l'oeuvre sur partition de la tradition savante occidentale. Qu'en est-il des musiques d'oralité, phonographiques ou d'improvisation, du jazz, de la pop, du rock ? Un autre clivage apparaît dans le corpus des textes traitant de ces questions, qui sépare la philosophie analytique anglophone et l'esthétique dite continentale. C'est à partir de ces constats que l'auteur procède à un examen minutieux des textes fondamentaux de chacune de ces tendances. Il montre ensuite que la Théorie des musiques audiotactiles du chercheur italien Vincenzo Caporaletti offre un cadre rénové pour traiter de la question de l'être de l'oeuvre musicale dans toutes ses dimensions, écrites, orales, enregistrées, improvisées.
Après avoir exposé les principes fondamentaux de cette théorie, Laurent Cugny divise son exploration de la littérature en séparant les textes ne prenant en compte que les oeuvres d'écriture et ceux qui élargissent à d'autres horizons. Dans la première de ces deux parties, on retrouve les principaux auteurs de l'esthétique analytique anglophone (Nelson Goodman, Peter Kivy, Jerrold Levinson). Leurs thèses sont mises en regard de celles des philosophes continentaux dont, outre les classiques (Jean-Paul Sartre, Roman Ingarden), certains auteurs plus rarement pris en compte : Gisèle Brelet, Boris de Schloezer, Mikel Dufrenne, Étienne Gilson, Étienne Souriau. Dans l'autre partie sont examinés des textes questionnant l'oeuvre de jazz (Andrew Kania, Julian Dodd), de rock (Theodore Gracyk, Roger Pouivet), de pop (Agnès Gayraud). Enfin, l'auteur nous livre sa propre vision d'une théorie parvenant à englober l'ensemble des musiques, appuyée sur le concept d'audiotactilité.
Ce volume s'inscrit dans un projet plus large, se donnant pour ligne, comme l'indique son titre, de Recentrer la musique, après la longue période de domination d'un décentrement prôné par la New musicology et ses prolongements. Dans un second tome, l'auteur, à partir d'une critique du culturalisme en musique, proposera un cadre renouvelé pour l'analyse musicale, reposant sur le socle méthodologique établi dans ce premier tome et tourné vers une musique en particulier, le jazz.
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