Pour son humour, pour une réalité traversée dans ses romans par un proche sentiment de vécu et un sens de la distance inouïe, pour le plaisir édifiant de lire cet écrivain, Mohamed Nedali, contemporain de la littérature marocaine. C’est un petit peu notre Mario Vargas Llosa par l’élan du récit abracadabrant, coloré et jouissif porté par des descriptions au scalpel de personnages de seconde zone où l’on retrouve la couardise sous des moustaches trop connues, le sens des hiérarchies biaisées et autres plaisirs du quotidien codifiés d’une société pétrie de rapports de forces. C’est le roman « Le bonheur des moineaux » (ed. l’Aube 2009) qui le fera connaître au grand public alors que l’écrivain, déjà bardé de prix nationaux et internationaux, met en scène un jeune guide dont le métier est de faire découvrir le Maroc par le trekking. Entre des centaines de clients, une jeune américaine qui randonne avec lui et tombe amoureuse du Maroc. Des années plus tard, elle souhaite le revoir. Branle-bas de combat : cette jeune américaine est devenue la 1ère Dame des Etats-Unis soit Mme Hillary Clinton. Dès lors, le festival des autorités makhzéniennes commence entre suspicion et gesticulations des services de sécurité. Le guide serait-il l’amant caché de la First Lady ? Ou un espion de la CIA ? Ou quoi puisqu’une visite d’une telle personnalité à « un simple guide » semble tellement incongrue dans un pays mené au pas forcé de la hogra.
Un écrivain majeur de la littérature contemporaine
L’œil de Nedali décrit la bêtise humaine et la docilité face aux apparences avec une pointe légère sans concessions. « Triste jeunesse » (ed. Le Fennec 2012), son dernier roman attaque frontalement le malaise d’une jeunesse en pleine ébullition, en 2011. Là, aussi, tout y est sensible et porté par une forte empathie par l’auteur. Mohamed Nedali qui a fait pleins de petits jobs dont garçon-boucher dès l’aube, pour poursuivre ses études de Lettres est aujourd’hui professeur de lettres à Tahannaoute où il travaille avec son épouse dans le lycée du douar. Reconnu sur le plan international, il demande depuis cinq années sa retraite anticipée pour se consacrer à l’écriture. Pas de réponse de la part de l’Etat. Lequel joue ici, à merveille, le rôle qui lui est attribué dans ses ouvrages… à notre plus grand désarroi pour cet écrivain majeur de la littérature marocaine.
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